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Une scène coupée au café des PTT

Quand Bertrand Morane n’est pas en train de contempler les femmes ou d’admirer leur image, il aime écouter leurs voix au téléphone. Le rôle central qu’occupe cet outil de communication dans L’Homme qui aimait les femmes n’est pas seulement narratif, mais aussi esthétique. Erotisme de voix sans visage. Truffaut avait d’ailleurs pris soin de préciser que le combiné téléphonique de l’appartement de Morane « devrait être particulier, soit par la forme, soit par la couleur ». Il sera noir, élégant et, à l’image de son propriétaire, sensiblement d’un autre temps.

Au fil des conversations téléphoniques échangées avec la mystérieuse « Aurore de 7 h », la douce voix anonyme du service de réveil (celle de Nathalie Baye qui ne joue donc pas seulement la jolie Biterroise), Morane semble obsédé par l’envie de mettre un visage sur cette voix, de raccorder l’image avec le son. Prévue dans le scénario original, cette rencontre tant espérée devait avoir lieu au Bar des PTT (l’actuel Café de la Mer), place du-Marché-au-Fleurs, à deux pas de la Préfecture et du bureau de Poste & de télécommunication du centre-ville. Finalement coupée au montage, cette scène devait montrer Morane désappointé par la présence de nombreuses postières en uniforme au moment de leur pause-déjeuner, épiant depuis une cabine téléphonique l’arrivée d’Aurore… qui ne vint jamais.